Yvonne VIESLET
Le 21 Août 1914, le colosse allemand était devant Charleroi; la bataille dura trois jours entre d’inégales forces.
Les Français barraient le passage de la Sambre.
A Monceau-sur-Sambre, village industriel du pays de Charleroi, les Allemands fusillèrent de paisibles citoyens et incendièrent plusieurs rues. Les sinistrés se réfugièrent dans les quartiers mieux respectés du bourg…
Parmi ceux-ci se trouvait la famille de notre petite héroïne; le père, Emile Vieslet, la mère Adelina Van Poeck et leurs 2 enfants, Simone âgée de onze ans et demi et Yvonne âgée de 6 ans
La guerre se prolongeant, la vie prit un cours monotone et lourd, sous l’oppression.
Yvonne Vieslet fréquentait les classes de la commune, travaillant régulièrement sous la direction de dignes maîtresses .
Ainsi passèrent les années 1915,1916 et 1917…
En 1918, on sentit comme un vent de délivrance qui venait de l’autre côté du front et on commençait à croire que les horreurs, les pillages, les incendies et les meurtres étaient bien fini…
Le papa d’Yvonne se rendait chaque matin à Marchienne-au-Pont pour son travail.
Or, le samedi 12 Octobre 1918, la petite Yvonne, qui avait entendu dire que des prisonniers français se trouvait là et elle voulait absolument aller les voir.
En passant par la rue de Châtelet, devant le Cercle Saint-Edouard, les habitants de Monceau et de Marchienne découvrent une maison entourée d’un jardin avec grillages où une vingtaine de prisonniers français sont parqués dans un état miséreux et lamentable.
Soucieuse de voir ces soldats français affamés, Yvonne approche de la grille, malgré l’interdiction faite par les Allemands , et jette sa petite couque blanche par dessus la grille aux poilus qui tendaient la main .
Ravie de son audace les passants tressaillent d’émotion et veulent applaudir lorsqu’un soldat allemand épaule son fusil et tire sur la fillette qui tombe sur le sol aux pied de sa mère !
Pauvre petite rose brisée…
Elle gémit: » Maman, j’ai mal . »
Ses joues blêmissent tandis qu’on la transporte en hâte vers l’hôpital de Marchienne , et ses paupières s’abaissent lentement …
Le soleil a beau dorer ses rayons et la brise adoucir ses caresses, la rose brisée par la tempête ne peut revivre ici-bas.
Les funérailles d’Yvonne Vieslet, grandiose dans leur simplicité émouvante de l’occupation, eurent lieu le mardi suivant, 16 Octobre 1918.
Le cercueil fut porté au cimetière et déposé tout près du groupe des 66 civils de Monceau fusillés en 1914.
Monument situé à Marchienne-au-Pont
Le Président français R. Poincaré décerna, à titre posthume, une médaille d’honneur en argent à la petite héroïne le 11 Sept. 1919
(Extraits de l’Ouvrage; Jusqu’à la Mort , des éditions de la Revue des Auteurs et des Livres , 79, Chaussée de Haecht à Bruxelles , édité en 1923.)