L’Armée Secrète est une dénomination attribuée aux différents maquis de résistances rassemblés en 1944.
Bouillon et le maquis des Mussettes.
Renseignement, aide aux illégaux, sabotages essentiellement contre les installations du chemin de fer et le matériel roulant, des guérillas, des distributions de journaux clandestins…
Il convient de mettre en évidence les sabotages du groupe Job de la Légion belge de Bertrix, effectués de Juin à Novembre 1942; les sabotages, coups de main et des activités diverses effectués par des effectifs dirigés notamment par GUIDART, DEGISVES, GOURMET, LIBOIS de la 2è section de la Légion belge de Bertrix en 1943.
Dans cette année 1943, aucun maquis n’est encore déclaré mais plusieurs petits groupes de réfractaires au travail obligatoire chez l’ennemi se cachent dans la forêt. A la moindre alerte d’une présence allemande, les réfractaires se dissimulent dans les réserves de paille et de foin et fuient dans les bois.
C’est début 1944 pour le secteur 7 ( Sud de la Province de Luxembourg) que les limites définitives sont constituées. Il est bordé au Sud par la frontière française d’Athus à Bouillon. A l’Ouest, le secteur 7 rejoint le groupe D du secteur 5 qui opère sur la Basse Semois. Corbion et Poupehan marque la limite. Au Nord, la ligne de chemin de fer Houyet-Virton constitue la limite sur Bertrix Paliseul.
Fin Octobre 1943, le s/lieutenant HARDY est nommé chef du groupe IV qui remet son commandement au notaire ROBERT de Corbion.
Le groupe IV de Bouillon est désormais dirigé par Joseph ROBERT, notaire à Corbion. Le groupe IV Bis d’Herbeumont formé fin Mai 1944 commandé par le capt-commandant en retraite Léon LAMI.
Les refuges du groupe IV sont installés dans la forêt du Moulin Hideux, au Moulin de l’Epine et à Buhan. Le maquis A occupe différents endroits dans la région de Auby – Cugnon. Le maquis B reste centré sur le village d’Auby.
extrait de l’ouvrage; L’Armée Secrète 1940-1944 sous la direction de Henri BERNARD & l’Union des Fraternelles de l’Armée Secrète
En 1944, le groupe IV comprend 3 compagnies opérationnelles.
Une compagnie d’état-major complète ce groupe qui est commandée par Emile GRIDLET.
Victor GOUMET, Jean LIBOIS et Pierre GUIDART sont respectivement les responsables des 3 compagnies.
Joseph ROBERT devient le commandant du groupe. Il occupe la fonction de notaire à Corbion.
270 hommes composent ces 3 compagnies.
La compagnie de Victor GOURMET est installée au camp du Moulin Hideux entre Noirefontaine et Dohan, proche de la Semois. De nombreuses embuscades vers Bouillon sont organisées avec plusieurs sabotages notamment sur les lignes de communications allemandes. Les camps flanqués dans des collines abruptes sont construits de planches et de tôles camouflés de branches d’arbres.
Pas de confort, chauffage interdit en hiver, habillement précaire, pas d’uniforme, nourriture provenant des villageois, peu d’armement, munitions réduites, quelques médicaments, couchettes de treillis, constituent la situation de ces hommes de l’ombre…
L’aumônier pour les 3 compagnies est l’abbé HENRY Maxime d’Auby S/Semois.
Tableau et photos de la famille Rochet de Dohan
La libération du 7 septembre 1944 à Dohan.
Dans son agenda de l’année 1944, où Julia Body écrit consciencieusement les menus faits du quotidien de la guerre, elle note, à la date du 7 septembre : « On ne voit plus les Allemands. Les deux ponts ont sauté. Il paraît qu’il y a des dégâts ». De la rue Dohan-Bas où elle habite, elle peut observer le trafic sur la route de l’Etat menant à Noirefontaine, cette route qui a été inaugurée 8 ans plus tôt, en 1936. Elle peut aussi surveiller la route stratégique, mais qui n’est pas encore goudronnée, qui relie Fays-les-Veneurs aux Quatre Chemins en passant par Les Hayons et Dohan.
Son regard ne peut voir les environs du pont et du château que les Allemands viennent de quitter après avoir fait sauter les deux ponts, l’ancien et le nouveau, à quelques minutes d’intervalle, à 6 h 45 du matin. Les partants avaient prévenu la population depuis plusieurs jours de l’imminence des destructions. Les ponts avaient été minés avec une quantité d’explosifs suffisante pour faire aussi sauter le village qui abritait des « terroristes ». C’est vrai que dans l’agglomération se terraient des juifs et des réfractaires au travail obligatoire.
Myriam Kubowiski et sa mère ont, à leur retour en Israël, planté un arbre de la paix au nom de leur hôtesse qui, veuve de guerre depuis le 11 mai 1940, n’avait pas hésité à les héberger, leur évitant ainsi la solution finale des camps de Buchenwald ou d’Auschwitz de sinistre mémoire. En même temps, la famille Talbot (nom de guerre), avec père, mère et deux enfants, partageaient les paillasses d’un sous-sol où la lumière du jour entrait par un soupirail et l’imposte de la porte d’entrée. Les murs du fond étaient taillés dans le schiste veiné de quartz, d’où suintait une source au débit variable suivant les saisons. Le sol était de la terre battue sur laquelle les paillasses étaient alignées. Une restait souvent vide, c’était celle de l’infirmière du maquis des Mussettes, à Noirefontaine. Après avoir soigné les blessés français et allemands de la bataille de Luchy, le 22 août 1914, cette personne avait, à 45 ans, repris du service dans le maquis de la Semois et ses nuits la voyaient apporter le renseignement dans les camps voisins de Bertrix ou de Cugnon. Chaque matin, l’abbé Henry, curé de Dohan, continuait à dire la messe de 7 heures et ma mère quittait la chambrée à 6 h 30 pour remonter dans sa chambre et y faire sa toilette.
Ce matin-là, comme à son habitude, ma mère s’est levée et madame Kubowiski, mue par un pressentiment, la supplia de rester et de ne pas aller à la messe. Bien lui en prit, car le souffle de l’explosion, arrachant les lambris de la chambre, aurait pu la blesser ou la tuer… Un des deux domestiques hongrois, Gaby Suto, avait déniché, Dieu sait où, une carabine de guerre et voulait joindre son action à celle des maquisards de Dohan, dont notamment les deux forestiers Maurice Body et René Rochet.
A son tour, ma mère le dissuada de le faire, par crainte d’une rétorsion de la part de l’occupant. Un mort dans la famille, le 11 mai 40, c’était suffisant ! L’on apprit plus tard que Noirefontaine devait être brûlé, une plaque « Dorpf zu brennen » ayant été apposée au carrefour de la gare. Les atrocités d’Oradour sur Glane et de Bande montrèrent que les craintes étaient fondées. Les Américains ont suivi aussitôt et un groupe s’est installé dans la ferme du château, face à l’hôtel de la Semois, au carrefour des deux routes, pour assurer le contrôle du passage du pont sur la rivière. J’ouvrais de grands yeux en regardant le chocolat et les oranges que je dégustais pour la première fois de ma vie. Après les privations de la guerre, c’était Bizance ! Ma mère parlait un peu anglais, suffisamment pour recevoir les deux officiers venus prendre le thé à la maison. Quelle chaleur auprès de ces militaires et quelle différence avec les militaires allemands qui partageaient, quatre ans plus tôt, la maison où nous étions réfugiés, lors de l’évacuation, à Isigny-sur-Mer, dans ce village qui allait devenir si célèbre à l’occasion du débarquement de Normandie du 6 juin 44. Plus aucune méfiance, à présent, rien que de la sympathie et des sourires, n’était pour nous les jeunes, la barrière de la langue. J’appris avec eux à compter en anglais. Quelle fierté ! Pour sécuriser le passage, les Américains avaient installé une barrière de mines en travers de la route, derrière une simple clôture. L’hiver 44/45 fut rude, neigeux et froid. Quelle joie pour les enfants de l’école communale de faire du traîneau sans être inquiété par une circulation quasi nulle.
Le Ier janvier 45, ce fut le drame. Le fils du fermier, Maurice MOUTON, ne pu maîtriser sa luge et alla culbuter un piquet qui tomba sur une mine dont l’explosion déchiqueta le corps du pauvre adolescent. Cet événement marqua le départ précipité des militaires américains qui s’enfuirent sans demander leur reste, sans un salut. Ils ne revinrent jamais sur les lieux, honteux d’avoir, par manque de précaution, causé la mort d’un jeune garçon. Peu à peu, l’euphorie regagna le village avec le retour des prisonniers que l’on allait accueillir en cortège à la Roche Percée. Ils revenaient d’Allemagne par le train jusqu’à la gare de Bertrix. Là, à pied, ils gagnaient Auby puis le Maka, la Semois que certains revoyaient pour la première fois depuis quatre ans…L’on ne peut traduire la joie indescriptible que, dans, notre cœur d’enfant, nous assimilions au plus beau jour de notre vie…
Jean-Etienne Hallet
En complément de l’article de Jean-Etienne Hallet sur l’accident causant la mort tragique de Maurice MOUTON, un autre drame est survenu à Dohan en Janvier 1945 avec le décès accidentel de Léa LAMBINET après une manipulation malencontreuse d’un explosif !
Le 19 Janvier 1945, deux gamins jouent avec ce qui ressemble à une balle qu’ils ramènent à la maison. Le petit Guy l’apporte à sa mère et c’est l’accident ! Lea LAMBINET perd la vie, les deux garçons sont indemnes.
4 Décembre 1946
Lettre de voisins décrivant le drame de Léa Lambinet
» Le petit Guy avait ramassé une espèce de balle d’enfant pour jouer à la maison mais malheur! C’était du plastique et après avoir amusé toute la journée avec ce maudit engin, sa mère lui prend dans les mains pour la mettre de côté. Au même instant, une terrible explosion se fit entendre tuant notre pauvre Léa et ébranlant fortement la maison, tout le mobilier était en miette. Roland a été légèrement blessé et Guy; pas une égratignure… »
Le mari de Léa LAMBINET, Edmond PIERRET était prisonnier de guerre en Allemagne du 28 Mai 1940 jusqu’au 10 Mai 1945. Il n’apprendra qu’à la libération la bien triste nouvelle…
Elie BODY, né à Auby s/Semois le 18 Mai 1894.
Il est le fils de Adolphe Body et Marie Baucant.
Sur le monument aux morts de Bertrix, on voit le nom d’Elie BODY parmi les victimes civiles.
Dans le portail des Mémoires des Hommes du Ministère des Armées Françaises, un listing des personnes civiles comprend notamment ; Elie BODY décédé le 16 Mai 1940 à Bouillon 64 (Pyrénées Atlantiques) renseigné par le Service Historique de la Défense de Caen.
» 11 Mai 1940, 18h 45; un panzer allemand dirigé par l’oberlieutnant Philip, commandant la 4ème compagnie, s’engage sur le pont de France à Bouillon qui se volatilise au même moment sous les explosifs français. Le char est détruit.
Un fugitif venant d’Auby , Elie BODY saute également dans cette opération. Quelques maisons proches du pont sont également fort endommagées par l’explosion ; notamment les maisons du vieux quartier des pêcheurs … »
extrait d’un article de Pierre Bourgeois dans Terres D’ Herbeumont à Orchimont.
Equipe de ces grandes Patriotes associées aux interventions partisanes. On reconnaît Jeanne Hallet, infirmière citée dans les 2 guerres mondiales.
Avec l’arrivée du 6 Juin 1944 et le débarquement des Alliés en Normandie, les opérations de l’Armée Secrète s’intensifient davantage pour harceler l’ennemi, organiser des sabotages et des sauvetages d’anti destructions. Pour accomplir ces actes, les partisans connaissent beaucoup de vicissitudes et la pertes de nombreux des leurs. Ces sacrifices ne peuvent absolument pas être oubliés.
Victor ADAM, ajusteur au chemin de fer, est arrêté par la Gestapo, le 19 Avril 1944 pour transport d’armes dans un train entre Namur et Liège . Il est interné à St Léonard et torturé puis fusillé à la Citadelle de Liège le 21 Avril 1944. Son épouse se nomme Madeleine MAZIERS.
Le lieutenant Jean RICHARD, chasseur ardennais, est né à Paris en Mars 1921.
Agent très important à Bouillon et sa région, chef de service de ce secteur, Jean Richard travaille avec son collaborateur et ami André BAUDUIN.
Leurs activités principales sont de surveiller la propriété de la famille Degrelle avec interception de leur courrier, rechercher davantage d’armes et explosifs pour la résistance, fournir des renseignements aux alliés sur les effectifs et les mouvements du terrain d’aviation proche à Douzy près de Sedan. Une autre activité essentielle était d’aider les prisonniers évadés des camps allemands à franchir la frontière vers la France.
Jean RICHARD est arrêté par la Gestapo le 30 Octobre 1942 à Bouillon et est conduit à la prison de Saint-Gilles( Bruxelles)
Il est retenu dans cette prison durant 6 mois d’horreur et de torture sans jamais dénoncer ses compagnons de la résistance
Le 13 Octobre 1944, le Conseil communal de la Ville de Bouillon avait décidé de procéder au retour sur leur terre natale, des restes mortels des Chasseurs ardennais André Baudouin et Jean Richard, tous deux fusillés à Bruxelles, le 22 avril 1943, ainsi que du Chasseur ardennais Victor Adam, fusillé à la citadelle de Liège le 21 avril 1944.
L’inhumation s’est effectuée simultanément à l’enterrement de cinq autres héros, également rapatriés, les Chasseurs ardennais Lucien Nicolas, Maurice Richard, Marcelin Leroy, Robert Dasnois et Joseph Brasseur, tous tombés en mai 1940.
La cérémonie fut grandiose et rassembla une foule immense. Croix commémorative à l’enclos des fusillés de la Citadelle de Liège.
Le Groupe IV bis d’Herbeumont
Le 26 Mai 1944, une subdivision du Groupe IV est créée pour devenir le Groupe IV bis qui opère dans un secteur défini entre Auby s/Semois, Cugnon, Mortehan, Herbeumont et Conques. Le commandant est Léon LAMI, il dirige 2 maquis; A & B. Le poste d’opération est fixé dans la ferme de Maurice Husson, rue de la Chernaudame à Auby s/Semois.
Le maquis A est commandé par Camille MOUTON. Des échanges d’armes sont effectuées avec le groupe de Victor GOURMET à l’embouchure du ruisseau des Aleines sur la Semois proche du site des forges du Maka.
Le cmdt LAMI raconte;
Les hommes dispersés trouvent des refuges au hasard de la forêt. Nous avons été dirigés vers les grottes St-Remacle surplombant la Semois. Nous avons logé là une huitaine d’hommes durant plusieurs jours. A la cime de l’éperon se dresse une grande croix qui va servir aux guetteurs du groupe.
Le ravitaillement est géré par Maurice Husson qui charge sa gamine Andrée de suivre le sentier vers la grotte Saint-Remacle avec un panier de nourriture. Ce sentier est réputé dangereux car de nombreux gardes chasses allemands empruntent également cette piste.
Nous avons scindé nos effectifs en deux pour minimiser les risques d’encerclement. Je suis allé occuper la Saurpire, endroit situé sur l’autre versant en bord de la Semois. Nous sommes cinq ; Jean & Constant Fritch, Léopold Ledent, André Hostin et moi-même. Cette jeune enfant a risquée sa vie à plusieurs reprises pour aider les résistants a rester sur le terrain jusqu’au jour J…
Félix Body, membre de l’Armée Secrète:
Lors d’une rafle, le 25 Avril 1944, Félix Body se cache dans le fenil de la ferme mais la ténacité des Allemands permet son arrestation. Piqué d’un coup de fourche, au hasard de la recherche dans le foin par un soldat allemand, Félix est traîné vers la gare de Bertrix avec une vilaine blessure qui l’ennuiera longtemps.
Il est envoyé à Arlon puis vers les camps en Allemagne dans le bassin sidérurgique de la Ruhr et sera affecté au travail obligatoire dans les usines de Mulheim et Essen.